Locarno Film Festival 2019
La 72ème édition de Locarno Film Festival a été très réussie : sa toute nouvelle directrice artistique Lili Hinstin a fait le choix de la diversité où les films asiatiques ont côtoyé les films d’Amérique latine et ceux d’Europe… Peu de films d’Afrique, mais une présence africaine dans de très nombreux films ! Quelques temps forts avec en particulier la projection du merveilleux « Höhenfeuer » de Fredi Murer (Léopard d’or en 1969) en sa présence, celle des Coréens Bong Joon-Ho, grand prix de Cannes avec son film « Parasite » et Song Kang-Ho, formidable acteur, qui nous ont offert un duo superbe d’intelligence et d’amitié, ou encore la remise du prix d’interprétation masculine au comédien Amérindien Régis Myrupu (non professionnel issus de la communauté tucano) qui a transcendé son personnage dans un très beau film brésilien « A fevre » de Maya Da-Rin.
Parmi plus de 250 films, une pépite : Vitalina Varela. C’est le nom d’une femme Africaine du Cap-Vert arrivant à Lisbonne, filmée magnifiquement par Pedro Costa, un réalisateur portugais à découvrir « toutes affaires cessantes », comme nous y incite Jean-Michel Frodon (voir son article sur ce film sur son site slate.fr). L’histoire de Vitalina se fond dans l’obscurité du bidonville où elle arrive pour rejoindre son mari après 42 ans, 3 jours trop tard… Une histoire sombre pour un personne lumineuse dont le visage et le regard nous aident à approcher la profondeur de l’âme, comme dans les portraits de Rembrandt (que les critiques du monde entier ont cités) …. Une histoire africaine de l’immigration particulière, et pourtant ordinaire : un mari qui part pour vivre ailleurs sans plus donner de nouvelles. Qu’est-ce qui pousse ces hommes à partir sans jamais revenir ? La lâcheté, l’humiliation, l’indignité ? En tous cas, certainement pas une vie meilleure ! Dans Vitalina Varela, comme dans « Rencontrer mon père » d’Alassane Diago, que nous avons montré en juin lors de notre festival Une semaine Eurafricaine au cinéma sur « Regards croisés sur les migrations », la vérité de l’immigration n’est pas ce qu’on croit !
Afro Américains, Antillais, Africains du Sahel ou du Centre, on a pu les découvrir sur la Piazza Grande ou en compétition, et grâce à la rétrospective « Les Noirs au cinéma » Black Light, dans des films aussi divers et variés que « Do the right thing » de Spkype Lee, « Camille » de Boris Lojkine (prix du public 2019), « Rue Case Nègres » de la Martiniquaise Euzhan Palcy, « Daïnah la métisse » de Jean Grémillon, « West Indies » de Med Hondo, « La Noire de… » d’Ousmane Sembene, ou encore « Baamum Nafi » (l’histoire d’une famille déchirée dans le contexte de la montée du djihadisme dans une petite ville du Nord du Sénégal) de Mamadou Dia, récompensé du Léopard d’Or du concours des cinéastes du présent, un beau prix pour ce réalisateur sénégalais, que nous avions fait connaître à Paris lors de la 4ème édition du festival Une semaine Eurafricaine au cinéma avec son premier film « Samedi cinéma ».
Mme Claude FISCHER HERZOG